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Dans la solitude des champs de coton

mise en scène Arnaud Rykner

: Note de mise en scène

Je vais « monter » un Koltès, l’an prochain. Dans la solitude des champs de coton.
Ça tombe bien, c’est l’année Koltès.
Ah ?... Pas de chance…


Pas de chance en effet quand on est allergique aux commémorations et aux célébrations nécessairement un peu artificielles, convenues, obligées, alors que ce genre de rencontre ne peut être commandé que par le désir… Pas de quoi, pourtant bouder ce même plaisir, étouffer son désir pour éviter de répondre à cette attente suspecte, vaguement truquée, peut-être factice (mais pourquoi pas aussi peutêtre parfaitement sincère, après tout ?). Finalement, de quoi ça parle, la Solitude, sinon, précisément, des méandres du désir, du trouble qu’il provoque, où il prend source, de son caractère incompréhensible, de sa façon de se cacher, de jouer avec nous, de la douleur qu’il provoque, du danger qu’il fait planer ?


Un homme en rencontre un autre, dans un espace qui n’en est pas un, un non-lieu hors du monde, dans une parenthèse du temps et de la ville.
Un homme est prêt à fondre sur un autre homme : pour lui faire quoi ? l’amour ? lui donner quoi ? la mort ?


Un homme refuse l’échange qu’un autre homme lui propose, refuse de montrer son jeu, de s’abandonner, d’abattre ses cartes, de se dévoiler, de mettre à nu ce qui lui tient à coeur, ce qui en fait un homme.


Deux trafiquants de désir se retrouvent dans l’obscurité, se cherchent, s’évitent, se frôlent, comme l’acteur sur la scène et le spectateur dans la nuit de la salle. Car le théâtre est là tout entier sous nos yeux, dans cette approche patiente, dans ce désir toujours à vif, impossible à satisfaire, et en même temps réalisé dans le temps même du théâtre (tel le poème selon René Char, « Amour réalisé du désir demeuré désir »…).


Qui du dealer ou du client, qui s’affrontent dans la lumière suspecte de cet entre-deux, aura le dessus ? La pièce ne le dit pas. A la fois abstraite (elle se joue nulle part et partout, maintenant et hors du temps) et profondément concrète (c’est aussi de corps qu’il est question, corps qui désirent, ont peur, s’attirent ou se repoussent comme des aimants qui ne cesseraient de se tourner autour), ce que la pièce de Bernard-Marie Koltès nous dit plus que tout, c’est quelque chose de notre humanité. Quelque chose de ce qui lie les êtres les uns aux autres, qu’ils se cherchent ou se fuient dans la nuit leur propre vie.


Décidément, pas de raison de bouder son plaisir, d’étouffer son désir.
Je « monterai » la Solitude, année Koltès ou pas…

Arnaud Rykner

avril 2009

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