Deux hommes placés sur le minuscule segment temporel où le chien devient loup, se rencontrent et s’affrontent dans un duel de paroles.
Le choc de leurs mots est le creuset de la naissance de violence, de la naissance de la guerre, comme une négociation diplomatique condamnée à échouer, comme un rituel qui se déliterait avant son terme sacrificiel, comme un désir de noyade que l’un et l’autre partageraient.
Au demeurant, aurait-il pu advenir quoi que ce soit d’autre à deux personnes qui attendent tellement l’une de l’autre ?
« Il n’y a pas d’amour. Il n’y a pas d’amour. » Dans cette répétition, la faille est béante, laissant pointer, comme étonnée, la tendresse. Les corps se fracassent dans l’abîme, sans rien toucher. Seule la perspective du sang mêlé par la guerre pourra, peut-être, leur permettre d’unir leur humanité.

Dans la solitude des champs de coton est le premier volet d’un diptyque autour de la Grande Guerre.

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« Pour cette confidence qui est en même temps un double discours prononcé au monde, les deux hommes opposent d’abord leurs différences corporelles, qui constituent leur manière d’habiter le monde. Le dealer est un roc détaché d’une montagne, il appartient au territoire, qu’il appréhende dans un arpentage incessant : c’est un homme qui marche, qui chemine dans un monde chaotique et imprévisible, un monde d’avant la « civilisation ». Au contraire, comme en perpétuelle fuite, comme une suite de bourrasques qui ne jamais peut cesser, sauf à mourir, l’autre traverse un espace sans qualités d’un point vers un autre. Il n’appréhende son environnement que comme un espace à domestiquer, à transformer en outil. C’est l’homme dont le monde est régi par des lois. C’est le colon, l’homo œconomicus qui proportionne ses moyens en vue de satisfaire des fins liées avant tout à une satisfaction personnelle. Ces deux êtres représentent deux archétypes en conflit mortel. »

Extrait de note de mise en scène, Sophie Hutin