: Présentation
Un homme vient réclamer le corps d’un membre de sa famille
mort sur un chantier de travaux publics en Afrique.
Un homme noir vient réclamer le corps de son parent -frère, cousin - aux hommes blancs qui
dirigent le chantier. Le corps, simplement. Pas une explication, pas de l’argent, simplement
le corps pour qu’il soit pleuré rituellement par les femmes afin d’empêcher l’âme d’errer pour
l’éternité.
Or l’un des hommes blancs lui a fait subir le pire des outrages : il l’a jeté aux égouts. Qu’il
l’ait tué, et pas accidentellement, est dans l’ordre du monde pensable, mais l’absence de
respect pour le corps du défunt est inconcevable.
La disparition sacrilège du corps que scande la réclamation inlassable d’Alboury sert de
révélateur au vide intérieur des blancs : ils ont perdu le sens de la vie. Seul Alboury, qui
n’appartient même pas au monde du chantier, sait pourquoi il est là. Les autres sont dans
l’errance : Horn, le moins perdu des blancs, est entre l’Afrique et Paris. Pourra-t-il
définitivement quitter l’Afrique et se réinsérer dans une vie française comme il l’envisage ?
D’ailleurs, il a déjà décidé de se marier, pour fuir la solitude, mais est-ce que ce sera
suffisant, lui qui aime tant les feux d’artifice… Et Léone, sa fiancée tout juste arrivée de Paris,
« petite bonniche » paumée prête à suivre le premier venu capable de l’éblouir par la
promesse de feux : elle est primitive, animale, au point de sentir l’Afrique, d’être fascinée par
son mystère et de ne communiquer réellement qu’avec Alboury en découvrant que c’est lui
qu’elle veut suivre au coeur de la forêt africaine.
Quant à Cal, lui qui se vante auprès de Léone d’avoir fait le tour du monde, qui égrène les
noms de villes étrangères capables de la faire rêver, sa sauvagerie instinctive est mise à nu
par l’isolement alcoolisé dans lequel il s’enferme sur ce chantier, comme si sa posture
occidentale n’avait été qu’un vernis que l’Afrique a fait craquer en révélant sa vacuité
désespérée. Paumé bien avant de quitter Paris, il a fui à travers le monde et l’alcool ce à
quoi il n’était pas capable de faire face et qu’il porte en lui. C’est ainsi qu’il dirige vers
l’extérieur, vers l’étranger, sa haine de lui-même. Quand, dans ce désert, apparaît une
femme blanche, ses tentatives pour la séduire sont pitoyables et assez vite agressives,
comme si toute trace d’éducation l’avait quitté.
La scène a pour toile de fond un chantier de travaux publics ; l’élévation d’un pont, la
réalisation d’une route bâtissent des structures visibles, accentuant, en contrepoint, la
construction intérieure si fragile des personnages. Si la confrontation est difficile, voire
impossible pour Cal, avec l’extérieur, c’est davantage le face à face avec la différence que
montre Combat de nègre et de chiens . La confrontation devient alors celle de deux façons- d’appréhender l’existence, ce qui crée un rapport au monde fondé sur des codes différents.
Par conséquent, les individus qui se retrouvent face à face sont radicalement différents, l’un
apparaissant plus sobre, plus sain que les autres, dépravés et perdus.
Dans ce combat, aucune règle n’est respectée ; les chiens, étrangement, sont dressés sur
leurs pattes postérieures sans pour autant avoir acquis la dignité qui y correspond.
Le combat se clôt sur le feu d’artifice qui avait été annoncé dès le début, explosion qui
embrase ce monde indigne, non sans laisser des traces.
Marilyne Rémer
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