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: Note d'intention

« Les gens malheureux ne connaissent pas leur bonheur »


C’est à la librairie de Théâtre Ouvert en feuilletant les éditions Actes Sud Papiers que j’ai vraiment découvert Pierre Desproges. Je ne l’avais jamais vu à la télévision. J’ai alors aimé furieusement, au delà de l’homme, de l’acteur, du bouffon tragique : l’auteur. L’interprète fulgurant totalement atypique qu’était Pierre Desproges a fait oublier qu’il était aussi un grand dramaturge. Comme si l’acteur et son génie faisaient écran à l’auteur.


C’est de cette passion pour son écriture qu’est né le spectacle Les animaux ne savent pas qu’ils vont mourir, au Théâtre des Abbesses.


La lecture des Inédits, que j’ai recherchés laissait apparaître un autre versant de l’auteur, plus ambivalent et sombre, plus complexe et lyrique parfois bêtement taxé de misogynie. C’est cette face méconnue de son écriture qui me donna envie de créer ce deuxième spectacle où je fais appel à deux grandes actrices pour modifier l’écoute de cet auteur, et ainsi révéler au public l’irrévérence et la violence comique de cette langue exempte de vulgarité.


Christine Murillo et Dominique Valadié, toutes deux singulières et inclassables dans le paysage théâtral français nous font entendre avec finesse et intelligence les subtilités et les paradoxes de Pierre Desproges à travers une langue stupéfiante faite d’enfance et de gravité.


Aujourd’hui, une nouvelle génération peut découvrir avec délice cette langue fracassante et jubilatoire où la pensée du monde et le regard acéré de Desproges met à nu nos aspirations. Il y a en effet dissection de nos fragilités. Humour et politique sont teintés de gravité, nous sommes amené à observer et comprendre l’inconfort des idées. Cette écriture est à la jonction de deux mondes, comme si elle provenait du classicisme français dans ce qu’elle a de plus écrit, et rejoignait soudainement une fulgurance presque insolente. Nous jouons ici avec une langue souple et pirouette à l’image du funambule à qui le vide ne fait pas peur, et risquant des raccourcis périlleux d’apparence arbitraire.


Pierre Desproges a le courage de la haine. Ce théâtre dont il nous parle lui même avec force lucidité n’exclut personne. L’individuel et le collectif y ont place. Son écriture rend hommage à l’humanité en engageant sa splendeur et son horreur.

Michel Didym

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