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Candide

+ d'infos sur le texte de Yves Laplace
mise en scène Hervé Loichemol

: Lux in Tenebris

Candide, héros amoureux, sans tache et sans reproche, se voit un jour brutalement expulsé d’un paradis d’opérette à grands coups de pied dans le derrière. Jeté, sans arrêt ni répit, dans un monde noir et dévasté, passant de malheurs en désastres et de catastrophes en calamités, Candide ne proteste pas, s’étonne à peine et accepte sans broncher les discours irréels de son maître Pangloss. Voltaire, on le sait, bataille avec Leibniz, Pope ou Wolff et vilipende les fanatiques de la Providence qui pensent que, Dieu étant parfait, tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais cette querelle philosophique, aujourd’hui datée et peu argumentée – on le lui a assez reproché – est, au fond, très secondaire.
L’optimisme qui occupe ici Voltaire, qui l’occupe tout entier, qui l’obsède même, n’est pas un corps d’idées à critiquer, une philosophie à combattre, une idéologie à détruire. C’est une pathologie : « la rage de soutenir que tout est bien quand on est mal ». Et la rage, comme chacun sait, est contagieuse. Voltaire est à vif, excédé, exaspéré par les ensorceleurs du cortex et les susurreurs du dormez-braves-gens-ça-va-s’arranger. Il n’argumente pas, et alors ? L’aveuglement – cette disposition volontaire de l’esprit à ne pas voir ce qui s’offre au regard – ne se soumet pas facilement à la raison. Ou si lentement.
Et Voltaire est un homme pressé. Pour que cesse l’écoeurante berceuse des marchands de sommeil politique, il faut se battre. Voltaire enrage et se bat : il montre, exhibe, insiste, frappe, destitue, raille, bouscule, culbute, renverse, détruit. Et, pour faire bonne mesure, il danse sur les restes du carnage. C’est à ce prix qu’il trouve la cadence effrénée de cet incroyable inventaire du malheur. C’est par là qu’il nous fait rire et provoque la fureur des censeurs de tout acabit. Avec lui, l’optimisme change de nature : ce n’est plus l’approbation béate de toute réalité, mais l’exercice farouche, obstiné de la lucidité.

Hervé Loichemol

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