: Propos des comédiens de la Comédie-Française
J’ai trouvé étonnant d’improviser sur l’idée du bonheur, autour de la mémoire, de l’enfance, de
l’orgasme, du plaisir physique et assez rapidement, de la mort. Comment souhaiterions-nous
mourir"? Question difficile.
Nous ne sommes pas familiers de ce genre de travail pourtant nous avons très vite tissé, entre
nous, des liens forts mais pudiques. Ce travail intime a été facilité par le fait que nous avons la
chance de faire partie d’une troupe et que nous nous connaissons à peu près tous. Se
questionner en s’appuyant uniquement sur sa propre vie n’est pas une démarche habituelle
pour visiter et répéter un rôle. Il a fallu livrer ses secrets au cours des improvisations. Ce qui
nous a uni.
Andrés est un homme très chaleureux qui a réussi à nous mettre en confiance. Il a un regard
très doux sur les êtres.
Aujourd’hui, il y a beaucoup de nos souvenirs et de moments très personnels de nos vie dans le
texte, mais ce qui reste secret est la part de vérité en chacun de nous.
Catherine Hiegel
Nous avons réfléchi sur le bonheur subjectif de l’individu, de la société urbaine dans laquelle
nous vivons et du monde d’une façon plus générale mais aussi sur le temps à vivre jusqu'à la
mort. Cette démarche nouvelle pour moi, basée sur l’improvisation, a éveillé ma curiosité.
Le travail avec Andrés a été très calme et serein pendant les dix jours d’atelier, sans aucun
jugement ni aucune difficulté majeure. Les histoires personnelles du comédien y sont
dépassées. C’est presque un acte politique, c’est-à-dire faire réfléchir les gens et évoluer les
choses, sans pour autant donner des réponses aux questions soulevées.
Andrés a eu un regard bienveillant sur nos propositions et une grande douceur en nous
dirigeant. Nous mettions en scène ensemble un moment de bonheur appartenant à une
personne du groupe et il était intéressant de prendre place dans le bonheur d’un autre. Le
bonheur est en relation directe avec le malheur, l’un ne va pas sans l’autre.
Alexandre Pavloff
Andrés a trouvé la manière de me mettre en confiance et de nous emmener d’une façon tout à
fait naturelle, à dévoiler, raconter, et mettre en scène des choses intimes. Avec sa nature
généreuse et son écoute, nous avons décliné le bonheur sur le thème des jeux d’enfants, tout en
légèreté, sans long discours philosophique préparatoire.
Au fil des improvisations, il est apparu que la notion du bonheur n’existe que par opposition à
la douleur et à l’idée de la mort. Nous avons aussi réfléchi sur le bonheur et le politique, dans
cette société de consommation qui incite au bien-être matériel."
C’est une belle aventure d’être l’inspiration directe d’un auteur, dans un processus qui nous
donne le rôle, à la fois de la marionnette et du chef d’orchestre, dirigé par un metteur en scène
qui construit dans la générosité et la communication.
Céline Samie
Concrètement le bonheur fait référence à des événements vécus, mais d’un point de vue
philosophique, il s’agissait d’envisager l’idée du bonheur à l’aide de souvenirs que nous avons
essayé de restituer le plus honnêtement possible.
En explorant nos souvenirs, les moments de bonheur n’ont pas été évoqués que par des
sentiments de joie. Par exemple, l’évocation d’un accouchement rempli de larmes de douleur.
Il m’est apparu que la mort prenait beaucoup de sens dans cette recherche.
Cette recherche a permis l’élaboration de textes sur lesquels nous travaillons et doutons
beaucoup mais il est rassurant de savoir qu’il y a un point d’interrogation dans le titre du
spectacle.
Shahrokh Moshkin Ghalam
Entré à la Comédie Française, pour ma première création dans cette maison faire partie d’un
spectacle qui a pour nom Bonheur ?, voilà une belle manière de commencer à écrire une page
encore vierge. Nous avons fait un voyage dans nos vies, en s’arrêtant ici et là, faisant ressurgir
des émotions, des anecdotes, des passions, des colères, j’avais l’impression d’être à une soirée
en famille, lorsque enfants, mes grands-parents nous projetaient les photos de nos vacances
passées. Ce qui a été passionnant, c’est qu’au lieu de partir d’un texte qui peu à peu va
rencontrer notre être intime, nous sommes partis de notre intimité, de notre mise à nu pour
qu’un texte puisse s’élaborer et «"faire théâtre"». Nous faisons théâtre avec nos vies. Il y a eu
beaucoup de joie dans tous ces moments partagés et puis les jeux, les chansons, des questions
plus graves comme «"comment aimerions-nous mourir"?"» Et quand même, être ensemble
pour s’interroger sur le bonheur, c’est pas mal non"?
Gilles David, février 2008
Propos recueillis par Laurent Codair
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