: Autoportrait
Le texte, constitué de plus de mille six cents phrases juxtaposées est un enchaînement sec, sans chevilles ni logiques, de constats de l’auteur sur lui-même : une phrase, un constat. Au lecteur ou au spectateur de conclure ce qu’il veut ou peut – de faire la psychologie, la morale ou, plus modestement, d’apprécier les effets comiques nés d’associations surprenantes. La vie entière d’Édouard Levé se trouve dans Autoportrait, mais on ne l’y voit pas. Il ne veut surtout pas la reconstruire, faire le malin avec son personnage, légender un récit. Il se décrit sans amour-propre, en photographe – que par ailleurs il est : plaque sensible et mémorielle sur laquelle des souvenirs, des images, des goûts, des attitudes, des réflexes, des sensations, se sont inscrits. Ni plus, ni moins, mais, à chaque phrase, totalement ça : une photo cadrée d’instinct, avec soin, unie aux autres par ce qui semble un hasard, et qui n’est sans doute qu’une forme aboutie et méticuleuse d’absurdité. Pas de commentaires : un minimum d’expérience et un maximum de désespoir enseignent qu’ils sont toujours de trop. Édouard Levé a écrit Autoportrait dans une période de déprime intense, lors d’un voyage aux Etats-Unis. Convaincu qu’il va mourir là-bas, il écrit chaque soir dans sa chambre d’hôtel. « Maintenant, ça me fait sourire, déclare-t-il à Télérama en 2005. J’ai commencé à écrire en me disant qu’il fallait que je laisse vite une trace de moi car il me restait peut-être un mois à vivre. D’où ces phrases décochées comme des flèches ».
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