theatre-contemporain.net artcena.fr

Accueil de « Alice et cetera »

: Dario Fo et Franca Rame

54 ans de vie commune et théâtrale ou « un Nobel pour deux »

Lorsqu’il reçoit son prix Nobel en 1997, Dario Fo déclare: « Je dois mon Nobel à cette dame, sans elle je ne l’aurais pas eu ! » Cette dame, c’est Franca Rame, son épouse depuis 1954, avec laquelle il forme un couple inséparable dans le jeu, la mise en scène, le militantisme au service de toutes les grandes causes... « Je ne connais pas de couples d’acteurs, comme lui et moi qui aient fini leur vie ensemble », souffle-t-elle entre deux bouffées de cigarette blonde.
C’est vrai, leur couple est mythique et même si Dario Fo signe de nombreuses pièces, on connaît l’importance de France Rame dans son immense travail d’homme de théâtre. Ils ont à leur actif plus de 70 comédies et presque 300 monologues.
Il dit d’elle : « elle est capable de démolir entièrement ce sur quoi je travaille depuis des mois. Et puis nous le reconstruisons ensemble et je découvre qu’elle m’a sauvé d’une catastrophe et que ce qui n’était pour moi qu’une critique sauvage et désastreuse, est l’acte le plus généreux qui soit ».
À 79 ans, Franca le dit et le répète dans toutes ses interviews : « Tous les géants ont besoin d’un piédestal et bien moi cela fait 54 ans que je fais le socle du piédestal... ».



Lui, intellectuel ; elle, solaire...


Dario Fo est déjà un homme de spectacle lorsqu’ils se rencontrent. Cela se passe... au théâtre, la première fois où l’on joue l’un de ses textes. C’est parti pour plus de cinquante ans ! Des années de théâtre bien sûr, mais également de combat, dans une Italie où fascisme et terrorisme ne riment pas avec leur théâtre militant et satirique, toujours du côté des opprimés. Le couple va faire l’objet d’une censure impitoyable : banni des plateaux de télévision et de la radio, ils vont pendant plus de seize ans jouer à l’extérieur des structures officielles. « Si on a tenu le coup, c’est parce qu’on avait le public avec nous » confie celle qui a chèrement payé cet engagement. En 1973, elle est enlevée, torturée et violée par des militants d’extrême droite. Pendant des années, elle cachera, même à son mari, la dure réalité de son enlèvement jusqu’à ce qu’elle écrive et joue Viol.
Dario Fo reste un admirateur passionné de Franca Rame. Au théâtre, il considère qu’elle lui a appris l’économie du geste via sa science de l’improvisation. Son engagement ?
« Franca ne recule devant rien ! Elle a le courage d’exprimer certaines idées, certaines valeurs, la constance, le rationalisme, l’ordre au milieu de tout le désordre que j’organise à tout moment. C’est elle qui s’occupe de tout... » Le secret de leur longévité ?
« Ne jamais se mentir, surtout en ce qui concerne les projets. Nous ne sommes pas en compétition. Nous vivons toutes les situations côte à côte, il y a des hauts et des bas, comme dans toutes les familles mais ce qui nous sauve, c’est d’avoir toujours eu le courage de repartir à zéro. Nous sommes repartis à zéro des dizaines de fois. Il y a chez tous les intellectuels le devoir de se laisser gagner par ce qui les entoure ».
Chaque jour, près de 400 théâtres dans le monde présentent le travail de Dario Fo et Franca Rame.

Isabelle Demeyère

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.