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: Intentions de mise en scène

Espace public ou théâtre à nu / L’illusion en chantier


La pièce repose sur un savant mélange de réalité contemporaine (univers urbain, langue…) et de fantaisie imaginaire (un génie, des apparitions magiques, des grenouilles qui tombent du ciel…). En cela Albatros est un conte fantastique moderne. Toute la dramaturgie repose sur le doute persistant qui pèse sur les événements et les personnages : sont-ils vrais ou imaginés ? Sommes-nous en train de rêver ? Illusion et réalité sont inextricablement liées. Dans l’univers clos d’un théâtre l’illusion est la convention. Tout le monde est d’accord pour croire à ce qui se passe tout en ayant devant les yeux les artifices qui dénoncent cette convention (la scène, les lumières…). En plaçant le spectacle soit dans l’espace public, en plein jour, soit dans un théâtre pris à nu, on diminue les artifices conventionnels, on entretient un peu plus l’ambiguïté illusion/réalité et on renforce ainsi la clé de voûte dramaturgique de la pièce.


Dans la rue on peut créer l’illusion grâce à un simple geste poétique ou décalé, la dénoncer en montrant la machinerie du théâtre ou la faire disparaître en évacuant toute machinerie pour laisser les acteurs nus, plus vrais que nature. Notre intention est ainsi que le voyage du spectateur entre illusion et réalité soit moins tracé et plus mouvementé. Il nous plait d’imaginer qu’il soit tout au long du spectacle en train de se demander le statut des événements : vrais ? comme s’ils étaient vrais ? rêvés ? imaginés ?


A l’intérieur on prendra le théâtre à nu, levant ainsi le voile de l’illusion, et laissant apparaître les artifices et la machinerie.


C’est aussi une mise en abyme du théâtre que l’on se propose. Dans l’espace public ou dans un théâtre à nu la théâtralité ne sera pas acquise mais en chantier. En montrant le théâtre en train de se faire on abonde dans l’appel au théâtre que lance le texte (Casper qui raconte des histoires en espérant qu’elles trouvent une oreille pour la recevoir; les rêves auxquels on accepte de croire…).


Un espace bi-frontal / Confrontations


Jouer dans la rue ou dans un théâtre à nu nous permet aussi d’envisager un univers brut et non douillet et policé, en phase avec la violence contenue dans le texte.
L’espace sera bi-frontal. Cela permet de dessiner la rue, le lieu principal de la pièce, et de respecter les mouvements principaux des scènes, qui évoquent souvent face-à-face et fuites. Duels et départs. Passages. Cette configuration de l’espace oblige aussi les spectateurs à se regarder, à se confronter. Et le résultat de l’épreuve initiatique de Casper, le personnage principal, est bien que grandir c’est apprendre à se regarder, soi et les autres.


En intérieur nous souhaiterions installer acteurs et public sur l’espace scénique (nous nous déplacerons avec un petit gradin de 150-200 places). Nous casserions ainsi les codes institués de la représentation, les remettant en découverte et en chantier et préserverions une grande proximité des acteurs et du public.


Décor simple et transposé / Tréteau et bagnoles cassées


Les trois marches d’escalier sont dans le texte le lieu refuge des deux personnages principaux. C’est notre élément de décor principal et quasi exclusif. Elles sont plus grandes que la normale pour rendre les acteurs qui jouent les enfants relativement plus petits. Comme un tréteau de théâtre, elles sont l’élément à partir duquel se déploie l’histoire, le lieu de toutes les histoires. Elles peuvent être manipulées et transformées (en lit notamment à la fin de la pièce). Derrière les trois marches on imagine un petit univers vertical réalisé à partir d’éléments récupérés de voitures cassées (pneus, phares, bouts de tôles…) Comme les restes d’un carambolage. Pour clôturer un tant soit peu l’espace et resituer l’univers légèrement hostile de la pièce. L’assemblage de ces éléments ne sera pas réaliste, on en préservera la polysémie. Les acteurs pourront en extraire des morceaux pour les transformer en accessoires: un phare qui devient le soleil, des éponges qui deviennent les grenouilles…Ils l’utiliseront aussi comme un univers sonore. Le texte suggère une véritable partition musicale faite de bruits de voiture et de tonnerre, de chants de grenouilles. Nous la réaliserons car elle permet de faire émerger l’univers par transposition et donc d’inviter au voyage. Elle sera exécutée par les acteurs eux-mêmes, aidés d’un musicien ou d’une bande son.


Le choeur / Dans les corps des acteurs


Nous faisons le choix de dénoncer l’illusion du décor, de faire théâtre de tout. La transposition du décor et le détournement des objets permettent de s’éloigner du réalisme et de faire ce pas nécessaire dans l’imaginaire. Pour achever ce décalage nous voulons créer un choeur de quatre personnages habillés de noir, danseurs et manipulateurs. A la fois hommes en noir de la pièce, croque-morts, marionnettistes et ouvriers de scène, ils manipuleront au sens propre (la machinerie du spectacle) et au sens figuré (ce sont ceux qui manigancent l’histoire, qui tirent les ficelles, qui « font passer les épreuves » à l’image du personnage du Génie). Nous les voyons danser pour fluidifier les moments de manipulation et transposer dans le mouvement de leurs corps l’univers concret (la ville, les carambolages…) et les ambiances abstraites (la menace, le cataclysme ….). Ce choeur est composé des quatre acteurs qui joueront les rôles de l’homme qui court, l’homme qui n’a plus rien, la mère et le génie de l’huile de coude.


Les éléments de décor est très succincts, l’univers est peu figuré, tout passe donc par les corps des acteurs. On fait le pari que si l’histoire est racontée simplement, si le souffle est respecté, tout le reste transparaîtra, les rêves, la mort, la ville oppressante. Priorité est donc donnée aux acteurs.

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