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Abattoir

mise en scène Bernadette Appert

: Le Projet de maquette

par Bernadette Appert

Je voulais écrire un texte sur le sujet amoureux qui ne serait pas un conte de fées. Le sujet amoureux post coup de foudre, le sujet amoureux après « enlèvement », quand les chaines de la mécanicité conduisent peu à peu vers la mort.


Et Barbe Bleue s’impose.
De quoi on nous parle dans Barbe Bleue ?
Quels sens au delà du thème mythologique de la femme trop curieuse et de la désobéissance (autre variation du péché originel d’Eve) ?


Moi qui ne voulais pas utiliser de conte, je me retrouve happée par le mythe lui même, au delà de ce qu’il raconte, tout ce qui en est sous-jacent, tout ce qu’il cache, dissimule. Comme si ce qui était caché n’était pas du tout là où on l’attendait, derrière la porte interdite, seule porte finalement dont on sache tout, derrière c’est une tuerie. Un charnier.


Dans ce mythe sordide, en serial killer, l’amour est un scénario répétitif impitoyable de violence, chaine de demandes de confiance intenables aux trahisons attendues inévitables. Comme si les personnages s’évertuaient de manière paradoxale à se piéger et à se conduire eux mêmes à l’abattoir.


Se laissant, après l’enlèvement, accrocher à la chaine qui mène au conditionnement.


Vivre est mortel, l’amour aussi.
Mais tant qu’on n’est pas mort comment reste t on vivant quand la mécanicité à tous moments nous entraine inévitablement vers la chaine de l’abattoir ?


L’abattoir n’est pour personne un lieu ordinaire.
Ce n’est pas un lieu léger.
C’est un lieu de mort.
C’est le lieu de l’abattage, de la masse, de la production, de la vente.
Un lieu du savoir-tuer propre vite et efficace.


Pour moi l’abattoir est un lieu de l’enfance.
Un lieu familial, convivial, où les gens m’appelaient avec beaucoup de tendresse la petite poulette.
Un lieu de bruits, d’agitations, d’objets et de noms étranges.
Un terrain de récréation où la mort est quotidienne.
Un lieu ordinaire où tous les jours après l’école je retrouvais ma mère avant de rentrer à la maison.


Dans les années 80, mes parents tenaient un abattoir de volailles, à Courrières, dans le Nord de la France. Le vécu, les souvenirs, les interdits, les fantasmes liés à ce lieu ont fait naître dans l’écriture du texte, “une Alice” aux pays de l’abattoir, tout un bestiaire intérieur de poules, d’anges, de Christ insomniaque, d’animaux empaillés...
Le regard posé par cette Alice sur la vie, la mort, l’amour, les règles, les croyances ouvrent une porte sur un autre parcours, celui d’une femme qui cherche ce qui la tisse, l’enchaîne, la déchaîne, la conditionne...

Bernadette Appert

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