: Notes d'intention
par Célia Houdart, février 2011
La première fois que je suis allée à Valenciennes pour ce projet avec Art Zoyd, j’ai été très frappée par le terril, la montagne noire qui surgit au milieu de la plaine. J’ai pensé aux mines, à la vie souterraine, à la fin de la culture ouvrière, mais aussi à l’étrange végétation qui pousse aujourd’hui sur ces tumulus. Je me suis mise à écrire pour ce paysage. La fiction mêle des éléments empruntés à la réalité présente et passée du pays (une ville d’aujourd’hui, un atelier de souffleurs de verre, un carnaval) et des personnages et des décors surgis complètement d’ailleurs : d’un tableau de Matisse, d’une installation d’Olafur Eliasson, d’une nouvelle de Baudelaire, d’un poème d’Umberto Saba. Il s’agit d’un conte métaphysique, où les personnages, entre veille et sommeil, dans un paysage tantôt vide tantôt plein d’objets miroitants, sont initiés au mystère des couleurs du monde.
Gérard Hourbette souhaitait collaborer avec un artiste visuel. Je lui ai présenté François Olislaeger, dont les dessins créent à eux seuls un univers qui n’a pas besoin d’être animé pour être vivant. Dans le film, il y a quelques effets, mais ils restent ponctuels et naïfs. Nous aimions l’idée de ralentir le flux des cartoons, afin de placer le public face à une sorte de page surdimensionnée, dans une situation un peu sidérante, comme lorsqu’on regarde La Jetée de Chris Marker, ou un terril. J’ai également suggéré une collaboration musicale avec Sébastien Roux, compositeur, avec qui j’ai établi, à l’occasion de plusieurs projets, une forte complicité.
Écrire pour le jeune public
J'écris pour le jeune public comme j'écrirais pour les adultes. Je ne crois pas qu'il faille trouver une langue,
un lexique, une syntaxe, une adresse spécifiques. Ni chercher à simplifier quoi que ce soit. Je pense que la
force d'un texte comme Le Grand Meaulnes d'AlainFournier
qui fascine tant les jeunes lecteurs tient
précisément au fait qu'il a été écrit pour le grand public, sans que l'auteur se soit dit au préalable qu'il
allait écrire un roman pour adolescent. Les contes des frères Grimm ou ceux de Perrault qui sont écrits
dans une langue classique rigoureuse, ne s'adressent pas a priori aux enfants. Et pourtant on sait leur
succès auprès d'eux.
Ce qui fait qu'un texte touche un enfant est assez mystérieux. C'est à mon avis une affaire d'imaginaire. Il
me semble en effet que la frontière qui sépare le réel du fantastique n'est pas la même dans l'imaginaire
d'un enfant et chez un adulte. Pour un enfant, le réel recèle toujours un possible mystère. L'inquiétante
étrangeté peut surgir partout et à tout instant. Les enfants n'ont pas besoin d'un monde extraterrestre
pour se raconter des histoires. Leur désir de fiction est irrépressible. Tout peut devenir un sortilège.
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