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Winterreise de Jelinek / Lecture

jeu. 01/12/16 : 18:30 15:00 à Créteil - MAC - Maison des Arts de Créteil

« Acerbe et radical, le "je" d’Elfriede Jelinek emboîte le pas au Winterreise de Schubert, traverse la folie du monde d’aujourd’hui jusqu’aux abîmes de sa propre vie. Ce virulent monologue, plus intime et plus politique que jamais, découpé dans de grands et puissants blocs de texte et lancé à la face du monde contemporain, s’écrase sur scène telles nos propres ruines : scandales politico-financiers, perversité de l’opinion publique, sexualité médiatisée par Internet, culte du sport et de la jeunesse. Sur fond de paysage délabré resurgissent l’enfance ruinée de l’auteure, l’amour-haine d’une mère dominatrice et la démence du père. Porté par une langue qui bataille contre elle-même, le cycle s’achève sur une réflexion d’une grave lucidité quant à son propre rôle d’auteure : "Nous ne voulons pas vous écouter, vous, avec vos éternelles vieilles rengaines. Votre assiette est pleine, ça devrait vous suffire." Saurons-nous faire taire notre monde pour entendre ce texte ? » (Elfriede Jelinek, Winterreise, Paris, Éditions du Seuil, 2012, quatrième de couverture)

Chez Jelinek, l’action n’est pas le point névralgique de l’écriture. Il n’y a pas d’intrigue à proprement parler, le personnage ne poursuit pas un dessein avec une action conflictuelle. Il est là dans sa finitude et parle. Ayant pour sous-titre « Une pièce de théâtre », Winterreise s’apparente néanmoins formellement plutôt à un roman qu’à un texte théâtral traditionnel. Se distingue cependant une voix monologique à travers une parole en partie autobiographique, comme le flux d’une pensée déposée sur le papier. La structure monologique, récurrente chez cette auteure, est symptomatique d’une action paralysée. S’il doit y avoir une action c’est celle de la parole qui annonce le temps qui passe. À travers les mots de Jelinek, le temps tourne en rond, incarne l’éternel recommencement, et pourtant son écriture semble fuir en avant pour s’échapper. Dès les premières phrases du texte nous sommes mis face à cette obsession du temps : « Qu’est- ce qui se met en chemin, qui prend aussi mon chemin, qui me prend en chemin ? Ça ne peut pas être mon ombre, je l’ai rendue au Passer, elle était tout ce temps derrière moi, à plusieurs reprises je suis passée près d’elle, elle ne voulait pas venir, ne voulait pas se mettre en chemin avec moi. Je me parle à moi- même, autrement personne ne me parle. » Ce texte est un mystère indigeste qui se résout progressivement : si au début le texte peut être difficile à appréhender, des clefs de lecture sont données par la suite sans pour autant épuiser l’interprétation. C’est par l’oralité et la prise en charge du rythme par l’acteur que cela se dénoue. La pleine présence passe par le langage : on n’a rien à dire, à défendre, mais il faut parler pour être vivant. On ne montre plus au spectateur des conflits, le langage lui-même est conflit. Si la structure théâtrale classique tend à disparaître, si l’action est paralysée que reste-t-il ? Winterreise traite de l’état de la société et de l’humain. Aujourd’hui plus que jamais il est nécessaire de faire découvrir l’écriture de Jelinek dans les théâtres français.

Mise en voix : Lucile Mary Assistanat : Magali Alphand Voix : David Lelièvre, Henock Malulu, Yohan Vallée, Maxime Villeléger Visuel : Julia Amarger

Winterreise de Elfriede Jelinek, traduction de l’allemand (Autriche) par Sophie Herr, paru aux Editions du Seuil. Elfriede Jelinek est représentée par L'Arche, agence théâtrale. www.arche-editeur.com

Calendrier

Le 01/12/2016 18:30
Créteil MAC - Maison des Arts de Créteil
Le 22/11/2017 15:00
Paris Ambassade d'Autriche