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Slawomir Mrozek

Pologne – 1930 - 2013

Présentation

SLAVOMIR MROZEK est né en 1930 à Borzecin, près de Cracovie. Son père était employé des postes. Les notices biographiques qui lui sont consacrées ont coutume d’affirmer qu’il a mené des études d’architecture, d’histoire de l’art et de langues orientales, ce que lui-même dément formellement : « Je n’ai fait aucune étude. Il est vrai que j’ai commencé à étudier l’architecture, mais j’ai laissé tomber au bout de six mois. Ensuite, j’ai étudié les beaux-arts pendant deux semaines avant de laisser tomber. Il est vrai aussi que j’ai commencé à étudier les langues orientales. J’étais sur le point d’être incorporé dans l’armée, l’armée communiste, et cette idée m’était extrêmement déplaisante. Tant que j’étais inscrit en tant qu’étudiant, je pouvais y échapper. Voilà à quoi ont servi mes études des langues orientales. C’était le seul département de l’université qui m’avait accepté. En réalité, je n’ai rien étudié du tout. Je regrette de ne pas avoir étudié la philosophie, par exemple. Je ne suis pas très fier de moi. »

À partir de 1950, il publie ses premiers dessins satiriques et humoristiques dans la presse polonaise, tout en commençant à écrire de très courtes nouvelles, dans lesquelles il tourne en dérision avec une ironie mordante les absurdités de la vie quotidienne sous le régime communiste et les stéréotypes post-romantiques de l’imaginaire polonais. Très vite, son double travail graphique et littéraire lui vaut une notoriété considérable, à tel point que son patronyme entre dans le langage courant pour désigner une situation particulièrement aberrante ou saugrenue, qui est décrite comme « tout droit sortie de Mozrek ». En 1958, il rassemble un premier ensemble de nouvelles dans un recueil intitulé L’ÉLEPHANT (SLON), qui deviendra la lecture obligée de milliers d’élèves polonais. Un second volume, LES PORTE-PLUME (WESELE W ATOMICACH), paraîtra l’année suivante. En quelques années à peine, ce surdoué contestataire aura su imposer son style railleur et iconoclaste sur le devant de la scène intellectuelle et littéraire polonaise.

En 1956, il publie sa première pièce, LA POLICE (POLICJA), une fable dramatique qui met en scène le rôle central joué par la police, y compris la police secrète, dans un État totalitaire accompli, dans lequel tous les déviants et autres opposants ont été mis au pas : afin de justifier son existence et sa nécessité aux yeux de l’opinion publique et de ses propres supérieurs, la police invente de toutes pièces une opposition – constituée, comme il se doit, de policiers – contre laquelle elle pourra déployer à loisir tout son savoir-faire répressif. La pièce est créée en 1959 à Varsovie, avant de se voir très vite interdite. Mais elle sera jouée dans toute l’Europe : Antoine Bourseiller la crée en 1960 au Théâtre du Tertre. Au début des années soixante, Mrozek abandonne le journalisme et écrit en peu de temps huit pièces en un acte, petites paraboles à l’humour grinçant, qu’il aura bien du mal à faire représenter en Pologne, mais qui seront créées dans plusieurs théâtres européens, avant d’être reprises maintes fois dans les cafés-théâtres.

Lassé par les tracasseries que ne cesse de lui imposer le régime en dépit – ou à cause – de sa popularité, il décide de quitter la Pologne communiste en 1963 pour s’installer en Italie. Sa notoriété commence à s’étendre à l’ensemble de l’Europe de l’Ouest : en 1963, ses œuvres sont publiées en trois volumes en Allemagne et, l’année suivante, il reçoit le Prix de l’Humour Noir pour l’édition française de L’ÉLEPHANT. En 1964, il publie TANGO, pièce complexe et ambitieuse témoignant du désarroi d’une génération devant le vide laissé par l’écroulement des anciennes valeurs : un adolescent révolté y impose à ses parents, progressistes désenchantés, un brutal retour aux bonnes vieilles conventions bourgeoises. À la fois satire antibourgeoise et farce anti-stalinienne, c’est-à-dire en phase totale avec l’esprit de l’immédiat avant-soixante-huit, la pièce lui vaudra son premier grand succès international, mais aura également un retentissement considérable en Pologne, où elle sera montée par Erwin Axer au Teatr Wspólczesny de Varsovie et par Jerzy Jaracku au Teatr Stary de Cracovie. TANGO demeure à ce jour la pièce la plus connue et la plus jouée de Mrozek.

En 1968, pendant les événements de mai, il vient s’installer à Paris. En août, lorsque les troupes soviétiques et polonaises du pacte de Varsovie envahissent la Tchécoslovaquie pour y mettre fin au « printemps de Prague », il manifeste publiquement son opposition à ce coup de force. Il est immédiatement déchu de sa nationalité et ses œuvres sont interdites en Pologne. Il obtient le statut de réfugié politique en France, dont il deviendra citoyen en 1973. À partir de 1972, les mesures d’interdiction prises à son encontre seront progressivement levées en Pologne, mais Mrozek n’en continuera pas moins à critiquer durement le régime, devenant ainsi dès 1975 le premier dissident tacitement toléré par les autorités.

C’est en France que les pièces de Mrozek, que l’on a par facilité classées dans le « théâtre de l’absurde », rencontrent l’accueil le plus chaleureux. Avant même son arrivée, nombre d’entre elles ont déjà été montées, notamment ses petites pièces en un acte, STRIP-TEASE, BERTRAND (KAROL) et EN PLEINE MER (NA PELNYM MORZU) – dans laquelle Pierre Richard fait ses débuts au côté d’Yves Robert – créées au Théâtre de Poche en 1966 par Antoine Bourseiller. C’est le comédien et metteur en scène Laurent Terzieff qui contribuera le plus puissamment à populariser l’œuvre dramatique de Mrozek. En 1967, il crée TANGO au Théâtre de Lutèce. Suivront LE PIC DU BOSSU (GARBUS) en 1979, L’AMBASSADE (AMBASADOR) en 1983, À PIED (PIESZO) en 1987. Et il crée le rôle de AA dans LES ÉMIGRES (EMIGRANCI), dans une mise en scène de Roger Blin (création le 24 octobre 1974 dans la petite salle du Théâtre d’Orsay).

En décembre 1989, au moment même où la Pologne s’achemine sur la voie de la démocratie – le pluralisme syndical y est rétabli, le rôle dirigeant du parti est aboli – Mrozek quitte l’Europe pour s’installer au Mexique, où, selon ses propres dires, il vivra « en ermite ». En dépit de l’éloignement, il demeure néanmoins très lié au vieux continent. C’est ainsi qu’il écrit directement en français L’AMOUR EN CRIMEE, comédie tragique en trois actes prenant à bras le corps l’histoire de la Russie au XXe siècle, que Jorge Lavelli créera au Théâtre national de la Colline en 1994.

En 1997, une nouvelle Constitution est adoptée en Pologne et les élections législatives consacrent le retour au pouvoir des partis issus de Solidarnosc. Après trente-trois ans d’exil, Mrozek rentre sans son pays. Depuis lors, il vit à Cracovie et publie régulièrement, comme à ses débuts, des dessins satiriques et des articles dans la Gazeta Wyborcza, le plus important quotidien polonais. Désormais reconnu sans arrière-pensées comme le plus grand dramaturge polonais d’après-guerre, il s’est vu attribuer de nombreuses distinctions et les manifestations organisées en hommage à son œuvre et à sa personne se multiplient à travers le pays.

Œuvres de Slavomir Mrozek traduites en français

Les ŒUVRES COMPLETES de Slavomir Mrozek sont publiées aux Éditions Noir sur Blanc. Dix volumes sont sortis à ce jour, dont quatre consacrés au théâtre (rassemblant un total de 26 pièces), cinq aux nouvelles et romans et un aux dessins humoristiques et satiriques.

Le volume VI, THEATRE 3, rassemble huit pièces, dont LES ÉMIGRES.

Le texte de la pièce est également disponible en version séparée aux Éditions Albin Michel, qui ont par ailleurs publié plusieurs recueils de nouvelles : L’ÉLEPHANT, LES PORTE-PLUME, UNE SOURIS DANS L’ARMOIRE et LA VIE EST DIFFICILE.

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