« Appétit des espaces du pays natal, mais vides. »
Peter Handke : Histoire du Crayon.
Qu’est-ce au juste que cette Carinthie rêvée par Peter Handke ? On serait tenté d’en dire ce que Jarry disait de la Pologne de son temps : « Un pays qui n’existe pas. »
C’est d’abord, dans la sobre scénographie de Jacques Gabel, une sorte de bloc diagramme ou de relief cartographique qui semble basculer doucement hors du cadre de scène et s’avancer dans la salle: une « lande-steppe » nous est-il dit, que délimitent de part et d’autre des motifs de treillages et l’icône d’un petit pommier. Au fond, sur le rectangle d’un écran nu, ne jouent que les nuances d’une lumière indécise entre jour et nuit, entre veille et sommeil. « Quel est ce temps que nous passons ici, tous les deux, sur le banc, dans le Jaunfeld ? Quelle année ? Que s’est-il passé entre-temps ? », demande le vieil enfant (« Moi » incarné par Laurent Stocker) qui renoue imaginairement le dialogue jadis ébauché avec sa toute jeune mère (Dominique Reymond).