À mon père
Samba est mon ami ; un Sénégalais au visage enfantin, les yeux cerclés de petites lunettes.
J’ai rendez-vous dans la nuit au cœur d’un village africain.
Samba est mon lien, j’ai confiance en lui, la voix douce, il parle comme un abbé sans la soutane, c’est rassurant : je n’ai pas le choix.
La rue qui monte au village est bouchée, un fourgon Renault 4x4 équipé en ambulance, portes arrières ouvertes, attend un brancard porté par quatre pompiers crânes rasés ; on aperçoit la tête d’un vieillard les yeux fermés, les bras tournoyants comme des ailes de moulin. Un embouteillage se forme, les sapeurs enfilent le vieux monsieur dans le vieux Renault. Une femme du même siècle tente de monter pour embrasser une dernière fois sa vie, un fort accent du sud-ouest la prie de dégager la chaussée, l’embouteillage est suffisamment conséquent comme ça, le 4x4 démarre, la vieille dame est avalée par le bruit et les clameurs.
Il fait nuit.