Les sujets qui m’inspirent posent la question du rapport à l’autre…comment recréer du lien dans une société de plus en plus cloisonnée, individualiste et repliée sur elle-même ? La participation du public n’est pas un principe dans les spectacles que je crée mais s’impose par les sujets même que je choisis et invite le spectateur à s’impliquer dans la représentation.
En 2007, j’ai créé la bête à deux dos ou le coaching amoureux de Yannick Jaulin qui s’inspire notamment du phénomène de société qu’est le love coaching. Tupp’ s’inscrit dans la lignée de ce précèdent spectacle. Il se nourrit de l’évolution croissante de la vente à domicile ainsi que du quotidien de conseillères culinaires, monitrices et concessionnaires chez Tupperware.
En participant à des ventes, en rencontrant des vendeuses à domicile, en découvrant des concessions Tupperware, je veux ouvrir une fenêtre théâtrale sensible et humaine sur cette bulle d’intimité qu’est la vente à domicile.

Angélique Clairand

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Tous les textes que j’ai écrits jusqu’à présent s’inspirent de mon histoire personnelle et familiale… Angélique Clairand, que je connais bien pour avoir fréquenté les bancs de la Comédie de Saint-Etienne à ses côtés, est arrivée l’automne dernier avec pour moi, une proposition de projet d’écriture tout autre : le destin d’une femme ordinaire, qui gravit les échelons d’un milieu professionnel bien particulier… celui de la vente à domicile.
Cette histoire de femme, de crise économique et de boîtes en plastique hermétiques paraît à première vue bien étrangère à mon univers… Elle ne l’est, en fait, pas tant…
J’ai eu envie de relever ce nouveau défi… Celui d’écrire « sur mesure », pour une autre metteur en scène, également comédienne, qui rêvait d’un solo à plusieurs voies (à l’instar d’une Etoile pour Noël) et de m’associer – le temps d’un projet – au travail d’une autre compagnie.
Avec Invisibles, j’avais expérimenté un travail de recueil de paroles comme base au processus d’écriture. Angélique Clairand et son équipe de création sont arrivées avec une quantité d’interviews de femmes travaillant dans le secteur de la vente à domicile à différents échelons d’une société. Ces paroles étaient déjà retranscrites et compilées et Christine Durif Brücker (chercheur à l’université Lyon 2 en Psychologie sociale) avait écrit, lors de la première résidence de création en mars 2011, un dossier dramaturgique fourni sur les paradoxes de ce secteur d’activité bien particulier.
Nous avons donc ensemble imaginé la possibilité de nous réunir à l’occasion de quatre résidences d’écriture en Rhône-Alpes, espacées chacune de plusieurs semaines, pour, à partir d’improvisations autour de la matière sociologique amassée, dessiner les contours d’un conte initiatique, imaginer le paysage et le contexte dans lequel nous allions faire évoluer Stéphanie Bugeaud, la femme ordinaire née de l’imagination d’Angélique.
De la même manière que je rêve parfois mon père en héros mythologique, Stéphanie Bugeaud a pris les traits de Pandore, la première des femmes, créature de Zeus, qui ouvrit la boîte défendue… Elle ne libèrera pas cette fois que des maux, mais bien mes mots, et nous le souhaitons, l’espoir d’une vie meilleure.

Nasser Djemaï