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"Paris - Septième Kafana"

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"Paris - Septième Kafana" est un projet sur les femmes vendues, les esclaves sexuelles et les femmes revenues. Ces femmes osent la parole contre l’effroi du silence. Avec leurs mots, leurs expériences, leur courage, elles sont dans un présent du témoignage. Nous sommes en 2011… Qu’est-ce qui se passe avec le monde ?

Il y a eu la chute du mur, la guerre des Balkans... C’est assez vertigineux au 21ème siècle de penser butins de guerre dans ce berceau où les tragédies antiques résonnent, Sophocle résonne. On pense démocratie, on pense Europe et l’on entend trafic d’êtres humains. L’étonnement terrible qu’il y ait un trafic de femmes dans une Europe qui tente paradoxalement une parité de plus en plus grande (voir la grande conférence du 21 septembre 2011 au Parlement européen, « Femmes d’Europe & Initiative citoyenne »).

Des femmes vendues se retrouvent dans notre Europe occidentale, « la riche ». Elles sont invisibles et nues, en périphérie de nos grandes villes : Paris, Oslo, Milan, Prague… Il y a des auteurs qui écrivent pour elles, pour que l’humain sache. (Herbjørg Wassmo, en Norvège, par exemple). Il y a des associations qui essaient d’apporter un peu de chaleur humaine, une écoute à ces femmes débarquées sur notre territoire français, qui essaient l’impossible. Et il y a le théâtre comme lieu privilégié pour déployer la parole de nos sœurs, et leur donner des chants, des rires afin que « le théâtre passe à travers les larmes ». Il est question de prêter des corps, des voix d’actrices à ces femmes revenues et à celles encore disparues. L’espèce humaine ne se détruit pas, l’homme, la femme, on peut les tuer. Vendre des êtres humains pour exploiter leur corps à des fins marchandes ne peut détruire l’espèce humaine mais tue l’être humain qui en est la victime. Les hommes, les peu nombreux, qui prennent la parole dans ce texte, sont des figures emblématiques, des propositions sur la bêtise, la lâcheté. Mais dans les témoignages, des hommes aiment des femmes, comme une lumière dans l’obscurité.

Il me semble primordial que le théâtre, à son tour, fasse un maximum de bruit autour de celles qui ont disparu sans laisser de trace. En tant que femme, je désire donner de la voix face au silence de l’indifférence. « La censure limite la somme de notre savoir, mais en plus elle entrave jusqu’à notre aptitude à comprendre. Comprendre qui a été perdu, quelle violence a été infligée, et la valeur des vies humaines » Judith Butler.

Nathalie Pivain.

Auteurs : Dumitru Crudu, Nicoleta Esinencu et Mihai Fusu

Traductrice : Danny Aude Rossel ("Le Septième Kafana" Éd. L’Espace d'un instant)

Conception : Nathalie Pivain – Compagnie Fractal Théâtre

(Artiste en résidence à la Maison d’Europe et d’Orient)

Lecture proposée dans le cadre de la manifestation "Tirez la langue !" 2011, organisée par la maison d'Europe et d'Orient du 23 septembre au 1er octobre 2011.